Tensions croissantes au Bangladesh sur fond de bouleversements politiques et économiques
Dacca, 27 mai 2025 – Le Bangladesh traverse une période de turbulences majeures, marquée par une montée des tensions politiques, des défis économiques et une crispation diplomatique avec l’Inde. À la veille de manifestations annoncées dans la capitale après la prière du vendredi, la situation reste volatile.
Crise politique et incertitudes électorales
Le gouvernement intérimaire dirigé par Muhammad Yunus, prix Nobel de la paix, fait face à une contestation croissante. L’absence de calendrier électoral précis alimente la frustration des partis d’opposition, notamment le BNP de Khaleda Zia, qui exige la tenue d’élections d’ici décembre. L’armée, par la voix du général Waker-Uz-Zaman, a récemment accentué la pression en appelant à des élections avant la fin de l’année, tout en exprimant son mécontentement face au climat politique actuel.
Le paysage politique reste fragmenté, avec la montée en puissance du National Citizen Party, né des mouvements étudiants qui ont provoqué la chute de Sheikh Hasina l’an dernier. La levée de l’interdiction frappant le parti islamiste Jamaat-e-Islami et la libération de plusieurs leaders islamistes suscitent des inquiétudes quant à une possible radicalisation du climat politique.
Tensions diplomatiques avec l’Inde
Les relations entre Dacca et New Delhi se sont tendues après que l’armée bangladaise a adressé des avertissements à l’Inde concernant la gestion des flux transfrontaliers de personnes non documentées. Parallèlement, l’Inde a imposé des restrictions sur 770 millions de dollars d’importations bangladaises via les routes terrestres, affectant des secteurs clés comme le textile, le plastique et l’agroalimentaire. Dacca réclame des discussions d’urgence afin d’éviter une détérioration supplémentaire des relations bilatérales, déjà fragilisées par la question de l’exil de l’ex-première ministre Hasina en Inde.
Crise économique persistante
L’économie bangladaise subit de plein fouet l’impact de ces tensions. Les restrictions commerciales imposées par l’Inde aggravent les perturbations déjà causées par une inflation élevée (estimée à 9-10 %), une croissance du PIB attendue entre 3 et 5 %, et une chute des investissements étrangers. Les économistes pointent la mauvaise gestion macroéconomique, la corruption endémique et une dépendance accrue aux envois de fonds des travailleurs expatriés comme facteurs de vulnérabilité.
La Banque centrale du Bangladesh a récemment révélé que 18 à 20 milliards de dollars auraient été blanchis à l’étranger sous le régime précédent, aggravant la crise de confiance dans les institutions financières du pays.
Sécurité intérieure et lutte contre la cybercriminalité
Face à la montée des jeux et paris en ligne, la police bangladaise a lancé une vaste opération nationale dans le cadre de la nouvelle ordonnance sur la cybersécurité 2025. Cette initiative vise à restaurer l’ordre public dans un contexte de méfiance généralisée envers les autorités et d’érosion de l’État de droit.
Ambitions culturelles et identité nationale
Sur le plan culturel, le conseiller à la culture du gouvernement a récemment présenté une vision axée sur la créativité et l’affirmation de l’identité nationale, soulignant la volonté de renouveler le paysage culturel du pays malgré les incertitudes politiques.
Conclusion
À l’aube d’élections incertaines et dans un contexte de tensions internes et externes exacerbées, l’avenir politique et économique du Bangladesh reste suspendu à la capacité de l’État à restaurer la confiance, à garantir la stabilité et à préserver ses intérêts stratégiques dans une région en pleine recomposition.