L’ONU face aux critiques et aux soutiens alors qu’elle célèbre 80 ans d’existence
Nations Unies — Alors que l’Organisation des Nations Unies (ONU) marque son 80e anniversaire, un débat mondial s’intensifie sur son rôle, son efficacité et sa capacité à s’adapter aux défis d’un monde en mutation rapide. Reconnu pour avoir apporté une aide humanitaire vitale à des millions de personnes touchées par des conflits et des catastrophes naturelles, l’organisme est en même temps critiqué pour ses lenteurs bureaucratiques et des décisions controversées prises dans des zones de guerre, notamment à Gaza.
Une institution née des cendres de la Seconde Guerre mondiale
Fondée en 1945 à San Francisco après l’horreur de la Seconde Guerre mondiale, l’ONU s’était donné une mission ambitieuse : maintenir la paix et la sécurité internationale, favoriser les droits humains, et promouvoir la coopération économique, sociale et culturelle entre les nations. Contrairement à la Société des Nations, créée en 1919 mais dissoute à cause de son incapacité à prévenir de nouvelles guerres, l’ONU a trouvé une légitimité durable grâce à son Conseil de sécurité, qui réunit les puissances victorieuses de la guerre — États-Unis, Russie (ex-URSS), Chine, Royaume-Uni et France — disposant du droit de veto.
Depuis près d’un siècle, l’organisation a porté des programmes qui ont marqué l’histoire : les opérations de maintien de la paix au Liban, au Rwanda ou encore au Mali, la mise en place des objectifs du Millénaire pour le développement puis des Objectifs de développement durable (ODD), ou encore la coordination des grands accords internationaux sur le climat comme la COP21 à Paris.
Les réussites humanitaires au cœur de la légitimité de l’ONU
Au fil des décennies, le Programme alimentaire mondial (PAM), le Haut-Commissariat pour les réfugiés (HCR), ou encore l’UNICEF, ont directement influencé la vie de millions de personnes vulnérables. En 2024, selon les chiffres communiqués par l’organisation, plus de 140 millions de personnes ont bénéficié d’une assistance de l’ONU, allant de l’aide alimentaire à la protection juridique des demandeurs d’asile.
Ces initiatives humanitaires demeurent l’un des piliers qui maintiennent la crédibilité de l’ONU sur la scène mondiale. En Afrique de l’Est, par exemple, l’intervention du PAM lors de la crise de famine en Somalie en 2011 est souvent citée comme un exemple décisif ayant permis d’éviter un bilan humain bien plus dramatique. En Syrie, malgré des blocages politiques au Conseil de sécurité, l’organisation a réussi à acheminer une part substantielle de l’aide humanitaire grâce à ses agences partenaires.
Des controverses récurrentes autour des zones de conflit
Pourtant, l’ONU se heurte régulièrement à des critiques sur sa gestion en situation de guerre. La controverse récente concernant Gaza en est un exemple frappant. Un rapport interne, relayé par un lanceur d’alerte, suggère que l’ONU aurait refusé des offres d’assistance logistique proposées par l’armée israélienne pour acheminer de l’aide aux civils palestiniens. Une note confidentielle, par ailleurs, révèle que certains responsables avaient envisagé de collaborer avec un groupe lié à des violences et à des pratiques de famine, ce qui a immédiatement suscité de vives préoccupations sur la neutralité et l’éthique de l’organisation.
Ces révélations ravivent des souvenirs douloureux liés à d’autres échecs passés. Le cas le plus souvent évoqué par les critiques demeure celui du génocide rwandais en 1994, où la mission des Casques bleus s’est révélée incapable d’empêcher la mort de plus de 800 000 personnes. De même, en Bosnie, la chute de Srebrenica en 1995, considérée comme un "massacre sous protection onusienne", reste une cicatrice profonde dans l’histoire de l'organisation.
La question de la légitimité et de l’impartialité
Au cœur du débat actuel se trouve la question de la légitimité de l’ONU. Des voix s’élèvent pour dénoncer ce qu’elles considèrent comme des “définition fluctuantes” de concepts centraux comme celui de “réfugié” ou de “droits humains”. Certains observateurs craignent que des pressions diplomatiques ou régionales conduisent à des interprétations variables, compromettant ainsi l’impartialité et la cohérence de l’organisation.
À l’inverse, les partisans de l’ONU soulignent que sa force réside dans sa capacité unique à réunir 193 États membres autour d’une table, même lorsque les tensions entre grandes puissances menacent la stabilité internationale. Pour eux, affaiblir l’ONU au nom de ses imperfections reviendrait à priver la communauté mondiale du seul espace universel de négociation.
Une comparaison régionale : Europe, Afrique et Moyen-Orient
Le regard sur l’efficacité de l’ONU varie selon les régions.
- En Europe, l’institution est souvent perçue comme un complément nécessaire à l’Union européenne et à l’OTAN, mais pas toujours comme un acteur décisif dans la sécurité régionale. Le rôle de l’ONU y est davantage centré sur la diplomatie multilatérale, par exemple les discussions sur le climat et les migrations.
- En Afrique, l’ONU conserve une importance stratégique, notamment grâce au soutien aux missions de maintien de la paix et à l’aide humanitaire. Toutefois, la lenteur des interventions et le manque chronique de financement ont aussi alimenté un sentiment de frustration sur le terrain.
- Au Moyen-Orient, région la plus marquée par les blocages diplomatiques au Conseil de sécurité, l’ONU apparaît souvent comme impuissante face aux guerres en Syrie, au Yémen et désormais à Gaza. Les critiques régionaux oscillent entre l’accusation de parti pris et celle d’inefficacité.
Impact économique et rôle mondial
Le budget de fonctionnement régulier de l’ONU représente environ 3 milliards de dollars par an, tandis que ses opérations de maintien de la paix absorbent plus de 6 milliards supplémentaires. Ces investissements sont massifs, mais leur impact économique est complexe à évaluer.
Au niveau local, les missions de l’ONU stimulent l’économie des zones d’accueil, générant des emplois directs et indirects. En République centrafricaine, par exemple, la présence des Casques bleus a pesé significativement dans l’économie de la capitale Bangui. À l’échelle internationale, toutefois, certains États membres contestent le rapport coût/efficacité de ces opérations, en particulier les pays financeurs principaux comme les États-Unis, le Japon et les membres de l’Union européenne.
Vers un renouveau ou une impasse institutionnelle ?
À l’occasion de ce 80e anniversaire, António Guterres, Secrétaire général des Nations Unies, a insisté sur la nécessité d’un “multilatéralisme renouvelé”, estimant que les menaces actuelles — changement climatique, pandémies, cyberattaques, et guerres civiles — ne peuvent être affrontées qu’à travers une réponse collective et coordonnée.
Les propositions de réforme du Conseil de sécurité reviennent en force dans le débat. L’idée d’élargir le cercle des membres permanents, pour inclure des puissances régionales comme l’Inde, le Brésil, l’Afrique du Sud ou le Nigéria, est de plus en plus évoquée. Jusqu’à présent, l’absence de consensus empêche toute évolution significative, laissant planer le risque que l’ONU reste prisonnière d’une architecture géopolitique figée depuis 1945.
Réactions du public et perception de l’avenir
Les réactions auprès de l’opinion internationale illustrent la dualité qui entoure cette organisation. Pour certains citoyens, l’ONU reste un phare d’espérance et la preuve tangible que la coopération internationale peut perdurer malgré les crises. Pour d’autres, elle est une institution dépassée, inefficace et trop soumise aux grandes puissances.
Une enquête récente menée par un institut indépendant de recherche sur la gouvernance mondiale indique que 59% des personnes interrogées dans 25 pays estiment que l’ONU “doit profondément se réformer pour rester pertinente”, tandis que seulement 18% la jugent “efficace dans sa forme actuelle”.
Une organisation à la croisée des chemins
Alors que l’ONU souffle ses 80 bougies, le contraste entre ses grandes réussites humanitaires et ses échecs retentissants demeure saisissant. Son avenir dépendra de sa capacité à réformer ses mécanismes de décision tout en préservant l’esprit multilatéral qui fut à l’origine de sa création.
La question reste ouverte : dans un monde multipolaire, où les rivalités économiques et géopolitiques s’exacerbent, l’ONU peut-elle encore être l’arbitre impartial qu’elle revendique être, ou se dirige-t-elle vers un rôle secondaire, éclipsée par des alliances régionales et bilatérales ?
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