La scène politique turque en mutation : Erdogan sous une pression croissante

Istanbul, 21 juin 2025 – Le paysage politique turc connaît des bouleversements majeurs alors que le président Recep Tayyip Erdogan fait face à une vague de critiques sans précédent, tant sur le plan intérieur qu’international. L’arrestation, le 19 mars 2025, d’Ekrem Imamoglu, maire d’Istanbul et principal rival d’Erdogan, a marqué un tournant décisif. Accusé de corruption et de liens avec le PKK, Imamoglu a été interpellé quelques jours avant sa confirmation comme candidat de l’opposition pour la présidentielle de 2028, déclenchant des manifestations massives à Istanbul et une condamnation internationale.

Cette arrestation s’inscrit dans une série de mesures répressives contre les figures de l’opposition, notamment des élus municipaux et des journalistes, accusés de corruption ou de collusion avec des organisations terroristes. Le Parti républicain du peuple (CHP) dénonce une instrumentalisation de la justice pour affaiblir l’opposition, alors que le gouvernement d’Erdogan multiplie les raids policiers dans les municipalités dirigées par le CHP. Plusieurs pays européens et organisations internationales ont exprimé leur inquiétude lors de l’Examen périodique universel du Conseil des droits de l’homme de l’ONU, pointant la détérioration de l’indépendance judiciaire et la restriction de la liberté d’expression en Turquie.

Sur le plan économique, la Turquie traverse une période de récession et d’inflation galopante, fragilisant davantage la popularité du président. Les tensions sociales se sont accrues, alimentées par des manifestations contre la politique économique du gouvernement et des appels au boycott d’entreprises proches du pouvoir. Cette situation économique critique limite considérablement la marge de manœuvre d’Erdogan, confronté à une baisse de soutien populaire et à la montée en puissance de l’opposition, notamment chez les jeunes.

La politique étrangère d’Erdogan, marquée par des positions fluctuantes sur les dossiers syrien, russe et palestinien, suscite également des interrogations. La suspension de projets énergétiques ambitieux et la gestion des relations avec l’Union européenne, dans un contexte de tensions internes, compliquent davantage la position du président. Malgré ses dénégations, des spéculations persistent sur une éventuelle nouvelle candidature d’Erdogan en 2028, alors que la Constitution limite à deux le nombre de mandats présidentiels.

Face à ces défis, l’avenir politique de la Turquie demeure incertain. L’issue des procédures judiciaires contre Imamoglu et la capacité de l’opposition à mobiliser la société civile seront déterminantes pour l’équilibre des forces en vue des prochaines échéances électorales.